
Ivona Tau
Installation, IA
Le travail d’Ivona Tau est animé par un « acte métaphysique d’imagination » — des mondes dans lesquels se perdre. À l’âge de 18 ans, elle découvre la photographie comme un moyen d’observer le monde et de capturer ses environnements en mutation. Tau commence avec l’appareil photo lomographique Lomo LC-A des années 1980 de son grand-père, qui lui permet d’expérimenter la couleur et la texture, s’engageant déjà sur la voie de l’abstraction et du surréalisme. Ayant grandi à Vilnius et étudié les mathématiques à Varsovie, elle a été témoin de la transformation de ces villes, passant d’un monde post-soviétique à un modèle occidental et capitaliste. Aujourd’hui, cette tension entre utopie et dystopie urbaine est au cœur de sa pratique artistique.
Plus tard, elle décide de combiner ses connaissances en mathématiques et en informatique avec sa sensibilité pour la peinture et la photographie — cette approche hybride, entre médiums et formes, permet à Tau de créer avec émerveillement, tout en explorant les potentialités offertes par la technologie. Soucieuse d’intégrer son environnement et son histoire personnelle à une esthétique générée par ordinateur, elle conçoit des œuvres comme Synthetic Still Lives, réalisées avec l’IA, à partir d’objets trouvés dans son propre appartement. Pour Tau, l’intelligence artificielle « permet de voir le monde autrement, au-delà des conceptions traditionnelles ». Elle entraîne ses propres modèles, créant ainsi des outils aussi personnels que le coup de pinceau d’un peintre. Tau construit et déconstruit ses compositions, jouant avec les technologies les plus récentes pour repousser les limites de la création artistique.
Cette approche lui permet aussi de revisiter son propre fonds photographique — issu de ses nombreuses marches méditatives dans les villes où elle a vécu — comme dans sa série Blue Hours (2020–2021), qui explore les notions de solitude et d’absence dans les environnements urbains. Le langage visuel de Tau mêle esthétique futuriste et culture cyberpunk. Oscillant entre l’hyperréalisme et l’hyper-surréalisme, ses compositions captivent le regard du spectateur.
L’illusion et le fantastique sont également des sources d’inspiration majeures pour l’artiste, à l’instar de Man Ray (1890–1976), Dora Maar (1907–1977), ou encore de la photographie expérimentale contemporaine de Max Passadore, du cinéma de David Lynch (né en 1946), et des couleurs éclatantes de William Eggleston (né en 1939) et David LaChapelle (né en 1963). Dans la chambre noire, Tau poursuit ses expérimentations, utilisant la photographie pour façonner de nouvelles réalités. Plus récemment, elle a commencé à combiner intelligence artificielle et art génératif longue forme — une pratique artistique impliquant des processus aléatoires codés — permettant au spectateur de devenir acteur en générant ses propres résultats. Attirée par l’interactivité, Tau aspire à créer des œuvres toujours plus immersives. Artiste multimédia ou « codeuse artistique », elle utilise la technologie comme vecteur d’exploration de la mémoire et de l’imaginaire.